Le Brésil de Lula
Les défis d'un socialisme démocratique
à la périphérie du capitalisme

Sous la direction de Jacky Picard

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Comment interpréter la victoire de Luis Inácio « Lula » da Silva aux élections présidentielles et la progression générale du Parti des travailleurs dans les différents scrutins d’octobre 2002 ? Les Brésiliens ont-ils soudainement pris conscience du risque de voir se reproduire chez eux le séisme économique et social qui a jeté leurs voisins argentins dans une misère jusque-là impensable ? Le recul du pouvoir d’achat des classes moyennes brésiliennes depuis 1999 suffit-il à expliquer leur ralliement à la candidature de Lula ? La conquête démocratique de l’État fédéral par un parti politique fondé en 1980 sur une triple base, syndicale, catholique progressiste et socialiste, signifie au minimum l’arrivée au pouvoir de dirigeants qui voient dans le libéralisme imposé par les économies capitalistes actuellement dominantes une idéologie visant à légitimer l’approfondissement des inégalités tant internes qu’internationales. Si le nouveau gouvernement, qui a pris ses fonctions en janvier 2003, s’emploie dans un premier temps à maintenir, voire améliorer, les grands équilibres macro-économiques, les premières mesures montrent son choix de relancer la croissance économique en élargissant la demande intérieure « par le bas ».
Cette orientation s’oppose au principal mécanisme qui avait assuré le « miracle brésilien » (1968-74) : la concentration des revenus. L’augmentation du pouvoir d’achat des plus riches avait alors permis de stimuler la production nationale de biens de consommation durables (électroménager, automobile, etc.) alors que la grande majorité de la population en restait exclue. Le programme « faim zéro » qui se propose d’assurer la sécurité alimentaire des Brésiliens les plus pauvres, mais aussi le relèvement des revenus les plus bas, l’accélération de la réforme agraire et l’aide au développement de l’agriculture familiale, sont de nature à imprimer une direction plus égalitaire au développement de l’économie nationale. Certes, l’aile gauche du Parti des travailleurs et certains mouvements sociaux comme le Mouvement des paysans sans terre se mobilisent pour tenter d’obtenir une radicalisation des réformes. Les marges de manœuvre budgétaires sont cependant étroites et le « gouvernement Lula » s’efforce de les élargir en jouant un rôle très actif dans la construction d’un rapport de forces plus favorable sur la scène internationale, seule stratégie pouvant permettre de renégocier les contraintes imposées aux économies périphériques par les centres de décision de l’ « économie monde ».

Éditions Karthala, Paris, 344 p., ISBN : 2-84586-410-8, résumés en français, portugais et anglais (« Livres Lusotopie », 1)
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